Arnaud Jourdain :

Je suis entièrement d’accord avec les observations du rapport entre outil et pensée, et entièrement opposé à cette phrase : c’est peut-être dans l’abandon de la corporéité de l’homme que l’humanité peut le mieux s’exprimer (tu nuances après, mais je voudrais m’attarder là-dessus).

Ecrire aussi vite que l’on pense est placer la charrue avant les bœufs : ce qui se conçoit bien, etc. Graver dans le marbre ou écrire au stylo-plume, c’est (comme tu le dis) peser chaque lettre, dérouler sa pensée et la concrétiser avec une attention aigüe. Dicter, cela convient aux lettres administratives et aux autobiographies, qui sont toutes les deux aussi frivoles. Le silence est d’or. Ecrire, c’est un peu sculpter, les coups de burin en moins.

Pour écrire, il faut donc écrire.

Ce à quoi je réponds :

Les travaux de l’Oulipo sont-ils donc frivoles ? (Penser, c’est écrire. Noter, c’est écrire. Développer, c’est écrire. Relire, c’est écrire. Oublier, c’est écrire. Toutes ces formes d’écritures se valent, et ne se suivent pas forcément dans cet ordre. L’acte d’écriture n’est pas à ce point sacré qu’il est interdit d’écrire vite. « Si j’avais le temps, j’écrivais moins », dis-je en paraphrasant Pascal. Mais j’écris quand même. Même maintenant, entre deux tasses de thé, sur mon téléphone.)