Lentement (24)
Les informations ont ceci de particulier qu’elles finissent toujours par triompher. Un tweet que j’aurais raté devient le message d’un ami que j’adore, le billet d’un auteur que j’admire, l’article d’un journaliste que je respecte. Les inepties ont ceci de détestable qu’elles finissent toujours par tout salir. Un tweet que j’aurais aimé rater devient le message d’un collègue qui se moque bien de m’interrompre, la newsletter d’un scribaillon qui s’est fait virer de tous les titres respectables, le tome indigeste d’un journaleux qui voit l’occasion de relancer sa carrière.
Six mois plus tard, la fermeture de mon compte Twitter est un double échec. Je reste exposé aux éructations des raclures de fond de serveur : mes collègues ne peuvent s’empêcher de commenter les rumeurs les plus farfelues, ma famille ne peut s’empêcher de relayer les déclarations les plus abrutissantes de ce qu’il reste de la droite la plus bête du monde et de ce qui devient la gauche la plus stupide du quadrant galactique, mes amis ne peuvent s’empêcher de prouver que mes efforts sont absolument vains1.
Je ne peux plus faire entendre ma voix : mes confrères médiatisent leurs moindres faits et gestes pour faire grossir une audience qui compte de moins en moins de lecteurs, mes proches feignent d’écouter mes élucubrations mais personne n’est dupe, et mes amis pensent que je devrais arrêter de courir après les moulins. Ils ont raison, bien entendu. Ce n’est plus le travail qui paie, mais la communication autour du travail, le métatravail qui devient le travail lui-même, et je ne peux pas me plaindre de refuser de faire le job.
Sauf que je préfère faire plutôt que dire, une phrase saugrenue venant de quelqu’un qui ne fait qu’écrire. Comment réinvestir les réseaux sociaux sans devenir une « marque personnelle » ? Est-ce seulement possible ? Je n’ai rien à perdre (d’autre que la capacité de diffuser mon travail) en ignorant les réseaux sociaux, rien à gagner (d’autre que ma santé mentale) en jouant au grand jeu de la mise en scène permanente. Reste à savoir quel rien vaut mieux que rien. Nihil novi sub sole.
Biblio
Je dis souvent que je lis peu en cette période de l’année particulièrement riche en actualités, mais ce n’est pas à tout fait vrai. Je lis énormément, probablement plus qu’à tout autre moment de l’année, mais des fiches techniques et des notes d’analystes plutôt que des livres. Avant que la saison ne soit officiellement lancée, j’ai toutefois fini de picorer Pourquoi lire les classiques, qui m’a rappelé les heures passées affalé sur les bancs de la laverie de Fermat à dévorer des bouquins en me laissant bercer par les roulements de tambour. Ariadne voudrait être une réinterprétation féministe du mythe d’Ariane, c’est évidemment une tragédie. Il me tarde de reprendre la pile qui menace de tomber de la table de chevet.
Departures
Alors que le CD fête aujourd’hui même son quarantième anniversaire avec la commercialisation du lecteur Sony CDP-101, la deuxième édition de ma playlist Departures dure bien plus que 74 minutes, la faute à Nils Frahm. Si le mois dernier était percutant, ce mois-ci est plus planant, grâce à Nils Frahm.
MacGeneration
Adobe achète Figma, et je suis persuadé que c’est une acquisition inverse. L’iPhone 14 Pro tient toutes ses promesses. Les AirPods Pro 2 sonnent aussi bien qu’ils réduisent les bruits ambiants, mais leur irréparabilité m’emplit d’une grande tristesse.
Notes
Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Après avoir exposé toutes les raisons de ne pas acheter le Freewrite Alpha, qui reprend le format du Neo 2 sans renouer avec l’esprit d’AlphaSmart, j’ai évidemment dépensé une somme folle pour réserver l’exemplaire nº 11. Rendez-vous en juillet 2023.
Photo
Je ne pouvais pas passer devant la boutique de babioles Les Liles sans m’arrêter pour prendre une photo. Bruxelles me manque. En triant ma boite à chaussure numérique, je me suis aperçu que j’avais une certaine affection pour les « cadres dans le cadre », qui ouvrent la perspective en fermant l’espace. Je suppose que c’est le début d’un nouvel album.
Podcaaast
À l’issue d’un été fort studieux, qui s’est terminé sur un fantastique épisode consacré au designer Dieter Rams, Arnaud et moi abordons la rentrée de manière beaucoup plus prosaïque. Le podcaaast est un podcast « pas que tech », mais quand même un peu, et il fallait bien que nous commentions la présentation paranoïaque de l’iPhone 14 et que nous nous observions utiliser les modes de concentration et l’écran always-on.
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J’aime mes amis, je tolère ma famille, je supporte mes collègues. Ce n’est pas leur problème, c’est le mien. ↩︎