Image Anthony Nelzin-Santos.

Montblanc Deutschland GmbH
Herr Nicolas Baretzki
Hellgrundweg 100
22525 Hamburg

Lyon, le 9 juin 2019

Cher monsieur le CEO de Montblanc,

offrez un séjour en Provence à vos chimistes. D’abord parce qu’ils le méritent. Ensuite parce qu’ils devraient avoir la chance, au moins une fois dans leur vie, de voir un champ de lavande de leurs yeux vrais.

Veuillez agréer, monsieur, l’expression de mes sentiments distingués.

— Anthony Nelzin-Santos

Quand j’entends « lavande », je vois le mauve intense des champs rasés par la lumière crépusculaire, le bleu des épis qui ploient sous le poids des abeilles chargées de précieux pollen, ou même le gris de la récolte desséchée par le cruel soleil provençal. Je ne vois pas ce rouge violacé, ou ce violet cramoisi, embouteillé dans un soulier de Cendrillon.

Cette couleur me rappelle plutôt celle des petites aubergines ou, je crois que je préfère, celle de la confiture de myrtilles. « Lavender Purple » coule abondamment de la plume dans un flot d’un violet profond, et le trait saturé de pigments sèche rapidement sur la page. À défaut de connaitre la couleur de la lavande, Montblanc produit des encres incroyablement plaisantes.

Le « Lavender Purple » n’est pas loin du noir lorsqu’il sort d’une plume extrafine, à l’exception peut-être de celle de mon vieux Pelikan M400 ouest-allemand, un délice de flexibilité qui révèle toute la chaleur de ce violet. Puisque la clientèle des Meisterstück n’est pas nécessairement la plus adroite, « Lavender Purple » est formulée pour être facile à nettoyer, et n’offre donc aucune résistance à l’eau.

Montblanc oblige, la boite de huit cartouches vaut 8,99 €, le prix d’un flacon de 30 mL chez d’autres1. Le fameux flacon de 60 mL, qui ressemble à une chaussure, vaut une vingtaine d’euros. Le bouchon orné de la cime du mont Blanc n’est pas très large, mais le « talon » de la chaussure est suffisamment profond pour accueillir les plus grosses plumes2, la pointe du pied faisant office de réserve d’encre. Malheureusement, alors qu’elle fait partie de la gamme courante de Montblanc, « Lavender Purple » est parfois plus difficile à trouver que les éditions limitées.

La citation

Un historien n’est pas un juge ; mais la manière d’agir d’un juge ressemble à celle d’un historien : comme le juge, l’historien cherche la vérité ; comme le juge, l’historien étudie des documents, vérifie des preuves, met les faits en perspective, interroge des témoins ; comme le juge, l’historien émet un verdict. Ce verdict n’est pas définitif : on peut faire appel, il peut être révisé, réfuté ; mais c’est un verdict. C’est le juge qui l’émet, ou l’historien, non le témoin.
— Javier Cercas, « Le chantage du témoin », El País, 26 décembre 2010.

Écrit avec

Test écrit avec un Pelikan M400 (EF) encré avec Montblanc Lavender Purple sur un bloc Rhodia nᵒ 18 ligné (80 g/m²). Article rédigé avec un Smart Keyboard et Ulysses pour iPad.


  1. Mais bon, ce sont des cartouches standard, et le petit écrin fera un parfait cadeau de dernière minute pour vos amis calamophilistes. ↩︎

  2. Dont celle, bien sûr, du Meisterstück 149. ↩︎